
Date de publication : 25/06/2025
Par Marion Braida
Qu’est-ce qu’une crise de colère chez l’enfant ?
Les crises de colère chez l'enfant, qui sont souvent appelées "caprices" ou "tempêtes émotionnelles", sont des moments inévitables dans le développement d'un enfant, en particulier pendant la petite enfance. Seulement, certains enfants présentent des états de colère plus importants que d’autres, ou ne l’expriment pas de la même façon.
Ces états émotionnels peuvent survenir à différents âges. On peut observer une présence de ces états de colère principalement entre 2 et 5 ans. Ils s’incluent considérablement dans le développement émotionnel et normal du jeune enfant.
La colère, c’est un processus neurologique. L’amygdale est à l’origine des réponses émotionnelles, cette partie du cerveau s’active lorsque l’enfant se sent frustré, stressé, en colère ou apeuré. Dans l’enfance, elle est plus active car le cerveau est encore en développement.
Le cortex préfrontal, qui lui est plutôt responsable de la régulation émotionnelle et des prises de décisions, n’est pas suffisamment développé pour permettre la gestion de l’émotion. L’immaturité de ce ce cortex signifie aussi que les enfants éprouvent des difficultés à retrouver le calme seuls, d’où l’importance de la présence bienveillante du parent (temps de présence adaptable selon les besoins de l’enfant).
Aussi, lors de la crise, des comportements similaires chez grand nombre d’enfants sont observables: jeter les objets, taper, crier, pleurer etc. Ces comportements sont l’expression d’un système limbique complètement débordé par l’intensité émotionnelle, et une libération du cortisol ( une hormone du stress) qui génère dans le cerveau une réponse biologique pour faire face à une menace: combat ou fuite.
Pour de nombreux parents, ces crises peuvent être déroutantes, stressantes, voire épuisantes. Toutefois, il est essentiel de comprendre que les crises de colère sont souvent l’expression d’un besoin ou d’une émotion que l’enfant n’a pas encore appris à gérer autrement.
Qu’est-ce qui déclenche une crise?
Comme vu plus haut, une crise de colère est bien souvent le résultat d'une frustration ou autre émotion désagréable intense. L'enfant, encore immature sur le plan émotionnel, est confronté à une situation qu'il ne parvient pas à maîtriser, ce qui déclenche une réaction parfois « disproportionnée », mais compréhensible au vu des réactions neurologiques.
Ces situations peuvent inclure un besoin insatisfait (ex: fatigue, faim), un frustration liée à une difficulté à se faire comprendre (souvent le cas des jeunes enfants qui n’ont pas encore acquis le langage verbal), un désir non aboutit (ex: le jouet que l’on convoite qui est dans la main du camarade, qu'on ne peut pas avoir)…
Toutefois, ces états de crises ne sont pas retenues uniquement par des besoins insatisfaits ou des désirs non satisfaits; il est commun d’observer la demande d’attention du parent, ou une forme de communication acquise par la colère (forme de mimétisme de la communication parentale).
☞ C'est pourquoi il est essentiel d'observer le contenu de ces crises: comprendre le "pourquoi" aidera l'adulte à mieux accompagner l'enfant.
Comment réagir en tant qu’adulte ?
Il est important de comprendre que les crises de colère chez l’enfant ne sont pas mises en place contre l’adulte, puisque l’enfant lui-même ne les contrôle pas, donc il ne contrôle pas non plus envers qui il va diriger ces comportements compensatoires (de fuite ou de combat émotionnel: taper).
Ce n'est par évidence pas une partie de plaisir. La tristesse et la colère sont les deux émotions les plus dures à accompagner pour les parents (c'est ce qui fait l'objet de beaucoup de consultations en thérapie). Dans la société, c'est aussi très inclus:
✶ exemple: mettre une tétine dans la bouche d'un enfant qui pleure.
Deux choses se passent ici:
➢ Vous ne permettez pas à l'enfant la régulation émotionnelle puisque la tétine coupe une partie ou la totalité de l'émotion.
➢ Vous renforcez une croyance sociétale inconsciente qui est que pas toutes les émotions ne sont exprimables.
Tout ça car elle vient vous déstabiliser vous en tant qu'adulte.
Certains parents vont se mettre en colère face à l'émotion désagréable de l'enfant, ou se montrer évitant. Ces postures inadaptées parlent beaucoup de la façon dont vous même avez été accompagnés à la gestion émotionnelle (par vos figures d'attachement, le contexte sociétal mais aussi les chocs émotionnelles qui impactent votre auto-régulation).
Votre calme est d’une grande aide!
N’oubliez pas que vous êtes le modele exemplaire de votre enfant. Votre capacité à rester calme apprend à votre enfant que la situation peut être controlée:
-Maman/Papa fait face à une situation émotionnelle importante (ma crise) et n’est pas débordée par ce stimulus.
A contrario, si votre réponse à sa colère déclenche vôtre colère, le message s’inverse et la crainte s’intensifie chez l’enfant.
-Maman/Papa fait face à une situation émotionnelle importante (ma crise) et ne sait pas non plus gérer ses émotions.
Votre enfant à besoin d’un espace sécuritaire et d’un parent compréhensif (lorsque vous êtes en colère, vous confronté l’enfant, puisque vous refusez son état émotionnel qu’il ne fait pas exprès de ne pas savoir gérer).
Aidez votre enfant à identifier en validant son émotion.
Votre enfant a besoin de savoir que vous savez identifier ce qu’il ressent et que vous comprenez ces émotions. Je vous donne quelques phrases intéressantes à poser dans vos échanges avec l’enfant:
-Je vois que tu es très en colère …
-Tu semble déçu ne pas avoir pu prendre le jouet avec lequel ton copain joue…
-Je comprends que tu puisses te sentir en colère quand …
Dans les cas où l’enfant utilise la colère comme moyen d’acquisition:
Donner à une enfant le jouet qu’il souhaite pour le faire taire de sa colère valide seulement qu’il a raison d’user de cet état pour arriver à son objectif.
-Si je pleure et crie lorsqu’on m’assoie, alors on me reprend dans les bras, et moi je préfère les bras. -> acquisition du comportement et renforcement de l’état de crise si le besoin n’est pas respecté.
-Si je tape et jette les objets, alors quelqu’un vient me voir pour me parler/ gronder, alors je me souviens que cette action permet que l’adulte me porte de l’attention.
Les limites que vous allez poser vont être d’une grande aide pour apprendre à l’enfant comment il peut remplacer son comportement.
Par exemple:
"Tu semble déçu de ne pas avoir eu le jouet avec lequel ton copain joue, et je le comprends, alors je te propose d’attendre qu’il ait fini de jouer avec ou d’en utiliser un autre: celui-ci te plait ? "
"Nous n’irons pas voir Tata/ Tonton/Papi/ Mémé aujourd’hui, et je comprends que tu sois en colère, nous irons un autre jour mais pas aujourd’hui. Alors, est-ce que tu veux que nous lui préparions une surprise pour la prochaine fois que tu la/le verra?"
➤ Encouragez votre enfant à trouver des solutions rassurantes et des moyens d’expression moins impactants pour lui, en ne cédant jamais à une demande formulée dans la violence, la colère, l’agressivité, le chantage.
Par évidence, vous devez faire le point avec vos tensions et conflits personnels pour ne pas user de ces fonctions dans vos échanges avec autrui, surtout devant votre enfant ou à l’encontre de votre enfant.
Un espace sécurisé saura épauler confortablement votre enfant durant la tempête émotionnelle qu’il traverse: une pièce calme où il peut choisir de se retirer (pas une punition), un calin réconfortant, une discussion avec l’enfant sur les genoux durant laquelle vous lui parlez calmement …
Durant le retour au calme, il est probable que vous ayez trouvé une amélioration dans la gestion de la colère de votre enfant:
Pensez aussi à renforcer les comportements « adaptés » en félicitant l’enfant !
C’est aussi le moment pour vous d’offrir des idées de solutions alternatives aux comportements « non appropriés » pour les prochaines fois.
Vous pouvez même rejouer des situations en mettant en applications ces fameuses solutions.
Pour conclure,
Les crises de colère chez les enfants font partie intégrante du développement émotionnel et social.
En tant que parent, l'une des tâches les plus importantes est d'aider l'enfant à comprendre et à gérer ses émotions, tout en posant des limites claires.
Cela demande de la patience, de la cohérence et une grande dose d'empathie. Avec le temps, l’enfant apprendra à mieux réguler ses émotions, ce qui est un atout précieux pour sa vie future.
Au besoin, vous pouvez en discuter avec un professionnel de la santé mentale ou de la petite enfance, qui saura vous conseiller ou vous accompagner dans la gestion de ces émotions.
Références:
Daniel J.Siegel « Le cerveau de votre enfant »
Tina Payne Bryson
© Keira Burton